« J’ACCUSE »
Le patriotisme passionné qui me caractérise m’a toujours poussé à fustiger à tort mon compagnon de tous les temps déçu et déchu par le pouvoir qui guide malencontreusement nos pas.
Cet ami qui connait mon cœur et mon amour inconditionnel pour la Guinée et qui sait que quoi qu’il advienne, ce pays ne sera jamais pour moi une pierre d’achoppement, déclara ouvertement un jour, à mes côtés, comme pour déclencher ma névrose, « Je ne suis pas fier d’être guinéen ». Cette petite phrase qui est devenue aujourd’hui un refrain m’a fait l’effet d’une bombe.
Je regardai mon ami du coin de mon œil et j’eu folle envie de le bruler vif. Dieu seul sait ce qui allait advenir si ce n’était pas mon ami. Six ans après son départ pour l’Europe, me voici rattraper par la réalité. Une réalité qui me pousse à le téléphoner pour lui témoigner mon regret de l’avoir traité d’apatride et d’homme de peu de foi.
Si seulement j’avais été empathique ! Pour soulager ma conscience, une observation générale sur ce pouvoir qui transforme quotidiennement des jeunes nationalistes, des patriote convaincus, des éternels optimiste en des rebelles prêts à braver la mer pour éviter la dépression d’une nation qui devient de plus en plus désespérante, s’impose à moi.
Je n’avais pas cru, on constate en 2020 des brunes de contestations violentes qui, comme les vagues de la mer, échouent sur les carapaces de la tyrannie installée, par ignorance, depuis 2010. Chaque chose à son temps, dit-on. C’est donc le temps de la bêtise ! Des jeunes tétanisés et tenaillés par un pouvoir qui n’a d’autre nerf que le pouvoir. Des opposants hypnotisés par l’envie féroce de renverser la pyramide. Aux prix de quoi et pour quoi faire ? Chacun à sa réponse.
Puisque ce pouvoir ne me donne aucune raison de l’applaudir, alors comme Zola, « j’accuse ». « Une patrie sans la justice est une prison » nous le dit George Clemenceau. Je n’aime pas cité l’idée des gens pour justifier mes arguments mais quand un grand homme de la guerre comme George Clemenceau le dit ouvertement, il faut t’en servir comme vérité.
Nous voici livrés à nous-mêmes comme des enfants orphelins, confinés entre les mailles de l’injustice, bâillonnés, cagoulés et jetés en prison sans raison valable. Le père a donc choisi ses fils. C’est évident ! Il traite ceux qui refusent de l’applaudir de bâtards. Et ceux qui l’appellent père sans savoir pourquoi, comme ces fils héritiers.
Ceux-là ne lui montrent jamais sa main tachetée de sang. Ils s’empressent de la nettoyer pour que le père les traite de digne fils. L’expérience m’a toujours prouvé que l’histoire donne toujours raison aux bâtards et à ceux qui reconnaissent la main salle du père et la lui montre.
Aux héritiers et aux non héritiers, une question lancinante se pose à tous : Avons-nous le droit d’accuser Dieu de nos malheurs Lui qui nous donné la meilleure part de la richesse du monde ?
Ne nous leurrons pas, nous sommes l’ombre de nous-mêmes et responsable du gouffre dans lequel nous nous sommes mis. Pourquoi ?
Que chacun interroge sa conscience humaine et non celle des préjugés. Vous comprendrez que ce n’est plus une question de choix, de vie ou de mort, de gagner la guerre ou de la permettre. D’ailleurs de quelle guerre s’agirait-elle ?
La guerre du soi contre soi, du peuple contre le peuple. Mon œil ! Dans une telle guerre si nous triomphons, ou si vous triomphez on « célèbrera notre victoire en portant en nous le deuil ». Nous avons compté nos morts, en avons fait la liste et sommes prêts à faire le décompte pour trouver des coupables et attirer le regard de ceux qui condamnent après la guerre et qui ne sont jamais capables de la stopper. Une telle façon de faire prouve combien de fois nous vivons dans l’état de nature.
J’accuse parce que je ne crois ni à la justice de l’accusé ni à la bonne foi de ceux qui accusent. A chacun de voir.
Gbamon Zebelamou
Médecin/Ecrivain