La Cour suprême américaine a donné son feu vert lundi aux expulsions de migrants opérées par l’administration Trump en s’appuyant sur une loi du XVIIIe siècle, tout en leur laissant la possibilité de contester.
La Cour suprême américaine a autorisé, lundi 7 avril, les expulsions de migrants en vertu d’une loi du XVIIIe siècle, leur octroyant toutefois « la possibilité de contester leur expulsion ».
Le président Donald Trump avait eu recours à cette loi d’exception datant de 1798 – utilisée jusqu’alors uniquement en temps de guerre – à la mi-mars, afin d’expulser vers le Salvador plus de 200 personnes présentées comme des membres présumés d’un gang.
Donald Trump s’est réjoui d’un « grand jour pour la justice », malgré les critiques des défenseurs des droits humains.
Un juge fédéral avait bloqué dans la foulée toute expulsion de migrants pendant 14 jours menées sur la base de cette loi et s’était inquiété des répercussions « incroyablement problématiques » du recours à l' »Alien Enemies Act ».
Donald Trump avait alors appelé à la destitution du juge James Boasberg, magistrat fédéral à Washington, provoquant un rappel à l’ordre de la Cour suprême.
Le président républicain s’est réjoui lundi de la décision de la Cour suprême, à majorité conservatrice. « La Cour suprême a confirmé la primauté du droit dans notre pays en permettant à un président, quel qu’il soit, de sécuriser nos frontières et de protéger nos familles et notre pays. UN GRAND JOUR POUR LA JUSTICE EN AMERIQUE ! », a-t-il dit sur son réseau Truth Social.
La Cour suprême a levé les restrictions temporaires imposées par le juge Boasberg, mais principalement pour des raisons techniques liées au lieu de l’audience durant laquelle il a rendu sa décision.
Le droit de « contester leur expulsion »
Les migrants qui ont intenté une action en justice pour empêcher leur expulsion se trouvent au Texas, alors que l’affaire dont le juge Boasberg a été saisie a été entendue à Washington.
La plus haute juridiction américaine a cependant précisé que les étrangers susceptibles d’être expulsés en vertu du « Alien Enemies Act », qui n’a été utilisé que durant la guerre anglo-américaine de 1812, la Première Guerre mondiale et la Seconde Guerre mondiale, devaient pouvoir bénéficier d’une forme de procès équitable.
« Les personnes détenues en vertu de l’Alien Enemies Act doivent en être informées et peuvent contester leur expulsion », peut-on lire dans la décision de la Cour suprême, selon qui « la seule question est de savoir à quelle cour il revient de statuer ».
Le président américain Donald Trump a fait de la lutte contre l’immigration clandestine une priorité, parlant « d’invasion » des États-Unis par des « criminels » venus de l’étranger », et communiquant abondamment sur les expulsions de migrants.
Mi-février, le président Donald Trump a désigné huit cartels latino-américains comme organisations « terroristes », une qualification qui élargit l’éventail des actions offertes aux autorités américaines luttant contre le crime organisé.
Donald Trump avait accusé les personnes expulsées mi-mars sans jugement vers le Salvador d’appartenir au gang Tren de Aragua.
Un immigré salvadorien installé aux États-Unis depuis 2019 avait alors été expulsé par erreur.
L’influente organisation de défense des droits civiques ACLU avait dénoncé l' »usage inédit et illégal d’une législation de temps de guerre ».
Un répit obtenu dans l’affaire de l’immigré salvadorien expulsé « par erreur »
L’administration Trump, sommée par la justice de ramener lundi aux États-Unis cet immigré salvadorien expulsé « par erreur » le 15 mars vers le Salvador, a par ailleurs obtenu un répit de la Cour suprême, à majorité conservatrice.
Kilmar Abrego Garcia, un immigré salvadorien vivant dans le Maryland (est) et marié à une Américaine, a été arrêté le 12 mars par des agents de la police de l’immigration. Il a ensuite fait partie des plus de 200 personnes expulsées le 15 mars par l’administration Trump vers le Salvador, la plupart pour appartenance présumée au gang vénézuélien Tren de Aragua, déclaré organisation « terroriste » par Washington.
L’administration Trump a ensuite reconnu devant la justice que son expulsion résultait d’une « erreur administrative », puisqu’un arrêté d’expulsion à son encontre avait été définitivement annulé par un tribunal fédéral en 2019.
Mais elle a affirmé se trouver dans l’impossibilité de réparer cette erreur, Kilmar Abrego Garcia étant désormais détenu dans une prison salvadorienne de haute sécurité, et a assuré qu’il faisait partie du gang salvadorien MS-13.
Une juge fédérale, Paula Xinis, a balayé les arguments de l’administration Trump, disant n’avoir pas vu de preuve d’appartenance de Kilmar Abrego Garcia à un gang, et exigeant de l’exécutif qu’il « facilite et effectue » son retour sur le sol américain avant le 7 avril, à 23 h 59 (3 h 59 GMT).
L’administration Trump a fait appel de cette décision, mais une cour d’appel fédérale a rejeté ce recours lundi à l’unanimité des trois juges. Elle a ensuite saisi la Cour suprême pour demander l’annulation de la décision et a minima sa suspension le temps qu’elle se prononce sur le fond.
« Cette décision – et son exigence de réaliser à la hâte des négociations internationales sensibles et de réaliser le retour de Kilmar Abrego Garcia cette nuit – est inédite et indéfendable », affirme-t-elle dans son recours à la Cour suprême, accusant une fois de plus les juges de s’ingérer dans les prérogatives du pouvoir exécutif.
Dans un bref arrêt non motivé lundi après-midi, le président de la Cour, John Roberts, a suspendu jusqu’à nouvel ordre la décision de la juge de première instance et donné jusqu’à mardi 17 h (21 h GMT) aux avocats de Kilmar Abrego Garcia pour formuler leur réponse écrite.
Avec AFP