La Cour constitutionnelle de Roumanie a annoncé vendredi annuler les résultats du premier tour de l’élection présidentielle du 24 novembre et ordonner un nouveau scrutin. Une décision qui intervient au lendemain de la déclassification de documents du renseignement national faisant état d’une opération d’envergure sur TikTok en faveur du candidat pro-russe, Calin Georgescu, arrivé, contre toute attente, en tête au premier tour. Ce dernier dénonce un « coup d’État ».
Coup de théâtre en Roumanie. À deux jours du deuxième tour de la présidentielle, la Cour constitutionnelle a annoncé vendredi 6 décembre dans un communiqué annuler les résultats du premier tour de l’élection présidentielle du 24 novembre et ordonner un nouveau scrutin.
« Le processus électoral visant à élire le président de la Roumanie sera entièrement repris et le gouvernement fixera une nouvelle date et un nouveau calendrier pour les étapes nécessaires », a-t-elle précisé.
La juridiction a pris cette décision au lendemain de la déclassification de documents du renseignement national faisant état d’une opération d’envergure sur TikTok en faveur du candidat pro-russe, Calin Georgescu, arrivé en tête au premier tour contre toute attente.
Ce dernier a qualifié vendredi la décision de la Cour suprême de « coup d’État », selon une déclaration écrite transmise à la chaîne de télévision Realitatea TV.
Le 24 novembre, l’outsider d’extrême droite, ancien admirateur du président russe Vladimir Poutine, a obtenu le plus grand nombre de voix. Un résultat qui a suscité des craintes quant à l’avenir du pays, membre de l’UE et de l’Otan, et déclenché des manifestations.
Accusations d’ingérence russe
Déclassifiés mercredi par les autorités roumaines, ces documents détaillant des manœuvres de déstabilisation présumées rappellent des techniques employées par la Russie. Une note d’information de la Direction générale de la protection interne (DIPI) indique ainsi que la plateforme TikTok a été le théâtre d’une « campagne non-officielle » a laquelle ont participé « environ 130 influenceurs totalisant plus de huit millions d’abonnés ».
L’analyse métrique effectuée par le renseignement roumain révèle qu’entre le 13 et le 26 novembre, les contenus associés aux divers mots-dièse de la campagne de Calin Georgescu ont atteint la neuvième place des tendances TikTok dans le monde. Toutefois, aucune trace d’une « amplification artificielle » de la diffusion de ces contenus n’a été révélée, d’après ce document.
Mis en cause, le réseau social TikTok a indiqué à l’AFP « n’avoir aucune preuve qu’une campagne coordonnée ait eu lieu sur la plateforme à ce jour ».
La Russie a démenti jeudi les accusations d’ingérence dans ce pays membre de l’UE et de l’Otan pour favoriser un candidat d’extrême droite opposé à l’aide européenne pour l’Ukraine.
« Nous rejetons fermement toutes les attaques hostiles, que nous considérons comme totalement infondées », a indiqué la porte-parole de la diplomatie russe, dénonçant « des accusations de plus en plus absurdes » à l’encontre de Moscou.
Klaus Iohannis restera en poste jusqu’à l’élection d’un nouveau président
Le président Klaus Iohannis a donné une courte allocution depuis le palais Cotroceni, à Bucarest, à 19 h heure locale (17 h GMT).
« La décision de la Cour constitutionnel s’impose à tous et nous la respecterons », a-t-il déclaré, ajoutant que cette décision était « extraordinaire » et que c’était la première fois dans l’histoire du pays qu’une élection présidentielle était ainsi annulée.
Sans nommer directement Calin Georgescu, Klaus Iohannis a brièvement rappelé les informations révélées par les documents déclassifiés du renseignement national : « Un candidat a bénéficié de manière non-officielle à une promotion massive. Ce même candidat a déclaré que ses frais de campagne étaient nuls, alors même qu’il a mené une campagne électorale très sophistiquée » sur les réseaux sociaux.
Les élections législatives n’ayant pas été annulées par la Cour constitutionnelle de Roumanie, ce sera au futur gouvernement de décider de la nouvelle date de l’élection présidentielle, a annoncé Klaus Iohannis.
« Je resterai en mandat jusqu’à l’élection du prochain président, comme le stipule la Constitution », a déclaré Klaus Iohannis, dont le mandat aurait normalement dû prendre fin le 21 décembre. « Je mènerai ce mandat jusqu’à son terme […] pour une Roumanie sûre, libre, européenne. »
Le président s’est ensuite adressé aux partenaires internationaux de la Roumanie pour les rassurer, répétant que le pays reste « stable », « solide », « pro-européen » et « l’allié de l’Otan ».
Avec AFP