Les patrons des médias au Sénégal appellent à une journée sans presse mardi pour alerter sur les difficultés dans leur secteur qui vit « une des phases les plus sombres de son histoire », plus de quatre mois après l’arrivée au pouvoir des nouvelles autorités.
« Les journaux ne vont pas paraître. Il n’y aura pas d’émissions de radio et de télévision. Les sites d’informations appartenant à des entreprises de presse ne vont pas diffuser », a affirmé lundi à l’AFP Mamadou Ibra Kane, le président du Conseil des diffuseurs et éditeurs de la presse au Sénégal (Cdeps, patronat).
Le Cdeps, qui regroupe des éditeurs privés et publics, a indiqué que la liberté de la presse « est menacée au Sénégal », dans un éditorial commun publié lundi par la presse locale.
Il met en cause les autorités notamment pour le « blocage des comptes bancaires » des entreprises de presse pour non-paiement d’impôt, la « saisie de (leur) matériel de production, la rupture unilatérale et illégale des contrats publicitaires », le « gel des paiements » dus aux médias.
« L’objectif visé n’est autre que le contrôle de l’information et la domestication des acteurs des médias », estime-t-il. Au Sénégal, le secteur des médias est confronté depuis longtemps à des difficultés économiques, les acteurs dénonçant des conditions de travail précaires.
L’éditeur de deux quotidiens sportifs parmi les plus lus dans le pays, « Stades » et « Sunu Lamb », a suspendu fin juillet leur parution après plus de vingt ans de présence dans l’espace médiatique sénégalais à cause de difficultés économiques.
Le Premier ministre Ousmane Sonko, nommé par le président Bassirou Diomaye Faye qui a pris ses fonctions début avril, avait dénoncé fin juin les « détournements de fonds publics » auxquels se livreraient selon lui certains patrons de presse qui ne versent pas leurs cotisations sociales.
Il avait également mis en garde les médias qui écrivent selon lui ce qu’ils veulent au nom d’une soi-disant liberté de la presse, sans aucune source fiable. Des propos que la profession avait jugé menaçants à l’encontre de la presse.
Depuis 2021, le Sénégal a reculé de la 49e à la 94e place au classement mondial de la liberté de la presse de RSF. L’ONG avait exhorté début juin le nouveau pouvoir à agir en faveur de la liberté de la presse après trois années d’agressions et d’arrestations de journalistes ou de suspensions de médias sous la présidence de Macky Sall.
Avec AFP